Hello tous !

Comme dirait Dan Aykroyd devant le bibendum chamallow, ça a fait chboum là-dedans ce matin, lorsque, à l'issue du visionnage du classique Noblesse oblige (délice d'humour noir sur fond de crimes multiples avec l'excellent Alec Guiness dans pas moins de HUIT rôles différents), les deux mots se sont affichés sur l'image finale juste avant le générique.

La police de caractères, plutôt élégante quoique sobre, est emblématique de ce qui se pratiquait à l'orée des années 1950, quand le cinéma avait encore un début et une fin. Et cette fin, elle était matérialisée par le mot Fin. The End en anglais dans le texte.

Ca m'a frappé d'autant plus qu'il m'a fallu presque 30 ans pour m'apercevoir de son escamotage. Parce que le mot Fin, aujourd'hui, n'existe plus, ou peu s'en faut, au cinéma. Ce qu'il s'est passé ? On n'en sait rien.

Les hypothèses pour expliquer la disparition sont en revanche nombreuses. D'aucuns estiment qu'il s'agirait de la conséquence de ce moment où les cinéastes ont voulu marquer le monde au-delà de leur oeuvre, effacer la frontière entre leur cinéma et la réalité. D'autres y ont simplement vu une ponctuation qui soudain a commencé à sembler superflue, voire lourde, à mesure que le générique, progressivement étoffé et déporté vers la fin de l'oeuvre (les crédits ont aussi été un temps présentés au début du film), a trouvé sa place au terme de la projection. Il y a peut-être même encore une autre explication. Les années 1970, qui ont progressivement assisté à la disparition de l'expression, sont aussi celles des premières suites, des premières franchises de cinéma. Je pense spécifiquement à James Bond, notamment, et à cette expression qui apparaîtra dans plusieurs longs métrages: "James Bond reviendra".

Goldfinger (1964)

 L'espion qui m'aimait (1977)

 Octopussy (1983)

Spectre (2015)

On y voit assez bien comment la série s'accommode du mot Fin, visiblement encombrant (The End... BUT, dans Goldfinger) jusqu'à progressivement l'évacuer dans ses oeuvres les plus récentes. Par analogie, il n'est pas exclu, donc, que l'on ait progressivement effacé le mot "fin" parce que le business du cinéma se ménageait la possibilité de prolonger l'histoire en cas de succès.

Aujourd'hui, il est amusant de repérer les oeuvres qui persistent à employer le vocable. Evidemment, il s'agit le plus souvent d'oeuvres restituant cet âge d'or du cinéma à l'ancienne. Etonnamment, The Artist n'y cède pas, sans doute parce que le film se conclut sur un cut et la sortie, par ce biais, de l'univers du fantasme de ciné. La La land, en revanche, n'y coupe pas, et nous gratifie d'un très joli The End comme on n'en avait plus guère vu sur grand écran depuis pas mal d'années.

Je vous invite à un petit jeu. Si vous retrouvez au hasard de vos visionnages un petit "The end" ou un "Fin" digne d'intérêt, postez-le en commentaire ci-dessous. Il est en effet assez amusant de voir comment les réalisateurs se sont accomodés de l'exercice. Après tout, à une certaine époque, 90% des longs métrages, au minimum, sacrifiaient à cette tradition. Graphie, intégration dans l'image... Chacun avait ses petites astuces pour faire de ce final un feu d'artifice, au point d'ailleurs que quelques illuminés s'amusent depuis quelques années déjà à les chasser. Vous pouvez retrouver leur travail, s'il vous intrigue, en cliquant ici.

Sur ce, vous êtes à la FIN de ce post. Ou pas.

Tiré de Color Rhapsodies - The Herring Murder Mystery

 

Tiré de Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander,
de Woody Allen, 1972

 

Tiré de A Night at the opera, de Sam Wood, 1935.